Perpetual Gateways, le nouvel album du musicien/songwriter/producteur/collectionneur brésilien, délaisse temporairement les territoires AOR pour aborder les lisières du spiritual jazz. Une exploration en compagnie d’invités de prestige (Patrice Rushen, Greg Phillinganes et Hubert Laws). Entretien.

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Funk★U :  Perpetual Gateways, votre 15ème album, explore les frontières du jazz et du spiritual jazz. Pourquoi avez-vous choisi cette direction ? Avez-vous voulu vous éloigner temporairement des sonorités AOR de vos récents enregistrements ?

Ed Motta : J’ai déjà enregistré des albums sous influence jazz comme Dwitza et Aystelum. Dwitza, qui était proche d’une bande originale de film, comportait des Ed Motta Perpetualclavecins et des instruments symphoniques. Aystelum mélangeait le spiritual et le free jazz avec les comédies musicales de Broadway dans l’esprit d’Escalator Over The Hill de Carla Bley.
Je compose des tas de choses différentes en permanence : des ballades soul, des valses jazz, des pop songs, des morceaux influencés par les bandes originales de films… Après avoir terminé AOR, ces titres d’inspiration jazz sont arrivés, ce qui est très naturel étant donné que j’écoute du jazz toute la journée avec un tas d’autres musiques que j’adore. Mais je vais absolument enregistrer de nouveaux titres AOR très bientôt, beaucoup de chansons sont d’ailleurs déjà prêtes.

 

Le casting de Perpetual Gateways est assez impressionnant : comment êtes-vous parvenu à enrôler Patrice Rushen, Greg Phillinganes et Hubert Laws sur cet album ? Qu’ont-ils apporté à ce disque ?

Le génial Kamau Kenyatta (pianiste, saxophoniste et producteur ndr) m’a aidé à organiser ces rencontres. C’était un vrai bonheur d’entendre ces musiciens que je connais via ma collection de disques jouer mes propres compositions et arrangements. Ils sont naturellement doués et peuvent s’adapter à tous les styles. C’était une expérience merveilleuse.

Lors de votre dernier concert parisien en décembre dernier, vous avez expliqué que c’était la première fois que vous écriviez tous les textes d’un de vos albums.

Patrice Rushen et Ed Motta

Patrice Rushen et Ed Motta

J’avais déjà coécrit des chansons dans le passé, mais je n’avais jamais encore écrit le début d’une phrase sur une de mes chansons. C’est sans doute parce que j’ai toujours été moins intéressé par les mots. L’aspect abstrait de la musique m’est toujours apparu comme un symbole de liberté, très loin des schémas de notre société.
J’ai commencé à écrire comme si c’était pour rire, mais j’ai fini par l’approuver car j’essayais de trouver des situations qui changeaient des chansons d’amour traditionnelles ou des « Don’t You Wanna Dance ? » qu’on retrouve dans presque toutes les chansons populaires. Ce que j’écris est plutôt proche du storytelling. Mon rêve serait d’écrire un jour une comédie musicale type Broadway à la manière de Stephen Sondheim, un de mes compositeurs favoris de tous les temps.

Votre performance vocale est étonnante sur ce nouvel album. Avez-vous porté une attention particulière à votre chant sur Perpetual Gateways ?

Merci ! Comme il y a moins d’orchestrations sur cet album, la voix bénéficiait de plus d’espace et elle est mise plus en avant. Sur AOR, j’ai enregistré deux fois en doublant les parties vocales comme le font  Maurice White et Donald Fagen. Cette fois, Kamau m’a demandé de ne chanter que sur une seule piste pour que ma voix sonne de manière plus soulful. Kamau a beaucoup contribué à ce son vocal, c’était son idée.

Quels sont vos prochains projets ?

Devenir riche (rires) ! J’espère pouvoir continuer à écrire des chansons, c’est ma mission et mon oxygène quotidien. J’aimerais bien aussi créer une nouvelle émission de radio comme celle que j’avais eu à São Paulo pendant deux ans. J’ai également l’intention de filmer un DVD où je jouerais mes hits seul au piano ou à la guitare, sans oublier quelques chansons que j’adore écrites par d’autres…

Propos recueillis par Christophe Geudin. Photo : Sabrina Mariez

Ed Motta Perpetual Gateways (Membran Records/Harmonia Mundi). Sortie en CD et version digitale le 5 février. Tournée française au printemps.



Ed Motta -Overblown Overweight