Une semaine après l’hommage de Meshell Ndegeocello à Prince dans le cadre du Festival Jazz à la Villette, l’esprit de James Brown planait sur une Grande Halle sold-out depuis plusieurs semaines avec une affiche réunissant Maceo Parker, Fred Wesley et Pee Wee Ellis.

L’habituelle bonne humeur de Fred Wesley donne le ton dès 20 heures. Dans son dos, un brass band de quarante cuivres vingtenaires intervient de manière aussi ponctuelle qu’efficace. Les nouveaux JB’s façon 100 choristes ont de la gueule, surtout quand Pee Wee Ellis dirige des sessions swing d’excellente tenue. From Be-Bop to P-Funk : « Imaginons que Bootsy Collins est à la basse, que Bernie Worrell est aux claviers et que Garry Shider est à la guitare », s’amuse Fred en lançant « A Blow for Me, a Toot for You ». L’inévitable medley « Pass The Peas/Gimme Some More » ne rate pas sa cible, puis l’événement tant attendu se produit peu avant 21h30 heures : Maceo rejoint ses anciens frères d’armes, Fred fige l’instant sur son numérique en shootant l’accolade de Pee Wee et de l’ex-lieutenant de James Brown. S’ensuit un « House Party » définitif qui transforme le hangar métallique en étuve plus chaude que le deuxième réacteur de Fukushima. Le G3 des souffleurs du Godfather ne dure que quelques minutes, et les solistes du brass band profitent de leur quart-d’heure Warholien lors d’une joyeuse battle de chorus arbitrée par les Trois ténors des horns.

On se met à rêver de revoir passer le JB Monorail, mais le 38-tonnes Maceo vient rapidement balayer nos rêves idiots. La « Funky Fiesta » à peine démarrée, Fred Wesley s’installe sur une chaise à l’arrière-gauche de la salle. Il ne la quittera plus des deux heures du set de Maceo, et seul Pee Wee Ellis viendra timidement choruser sur « Uptown Up ». Reste donc le Maceo show, source de ravissement pour les néophytes, mais Lac des cygnes éprouvant pour l’habitué de ses mornes prestations depuis plus de dix ans. Son funk en costume de VRP et ses musiciens aussi avenants que des contrôleurs de la RATP captent cependant un public réceptif, pour qui Jabo Starks est sans doute un décorateur d’intérieur. Ou le vrai nom d’Iron Man.

Maceo multiplie les name-droppings et les citations (Sly, JB, George, Prince…), mais son funk javellisé et incolore ne contient pas une once du danger et de la tension sexuelle de la musique de James Brown ou de Parliament-Funkadelic. « On m’a demandé pourquoi je n’avais pas rendu d’hommage à James Brown », commente Maceo après une relecture exténuée de Ray Charles. « Mais quand Fred Wesley, Pee Wee Ellis et moi jouons, nous rendons hommage tous les soirs à James Brown. » Va pour les deux premiers, mais le Godfather a dû effectuer trois grand-écarts/rattrapages de micro dans sa tombe en découvrant l’aseptisation de son héritage.