Dans Love & Hate, son deuxième album, Michael Kiwanuka explore de nouveaux territoires en exportant avec succès sa soul intimiste en territoires électriques et psychédéliques avec l’aide du producteur Danger Mouse. Rencontre avec l’auteur d’un des grands disques de 2016.
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Funk★U : Love & Hate, votre nouvel album, brasse de nouvelles influences, de Pink Floyd à Isaac Hayes en passant par Marvin Gaye et Ennio Morricone. Avez-vous eu envie de vous écarter des comparaisons avec Bill Withers et Terry Callier qui avaient suivi la sortie de Home Again il y a quatre ans ?
Michael Kiwanuka : Oui, il y a un peu de ça. Ces références n’étaient pas nouvelles pour moi car j’ai toujours aimé le la soul des années 1970 et le rock planant… J’ai commencé à réfléchir aux chansons de Love & Hate peu de temps après la tournée de Home Again, mais je sentais que je m’enfermais à nouveau dans ces mêmes références. Une fois de plus, il n’y avait que moi et ma guitare acoustique. J’avais écrit et enregistré à peu près quinze nouvelles chansons, mais je n’étais pas satisfait et j’ai décidé de repartir à zéro, tout d’abord avec le producteur Inflo qui vient du hip-hop, puis j’ai rencontré Brian Burton, alias Danger Mouse, et la direction du projet a complètement changé.
Que vous a apporté la présence de Danger Mouse à la production ?
Brian m’a aidé à être plus créatif à un moment où j’ai douté de mes capacités. À ma grande surprise, c’est lui qui venu vers moi et son travail sur « Black Man in a White World » m’a rappelé tout ce que j’aimais dans ses précédentes productions pour Gorillaz et Gnarls Barkley. Il a également réussi à me convaincre que proposer des titres longs n’était pas un problème. « Cold Little Heart », la première chanson de l’album, dure plus de dix minutes et je sais qu’il va demander une certaine patience aux auditeurs, mais quand tu écoutes « Maggot Brain » de Funkadelic ou « Walk On By » d’Isaac Hayes, ces morceaux prennent leur temps et ils t’emmènent ailleurs dès la première écoute.
Love & Hate est aussi un album beaucoup plus électrique que son prédécesseur.
C’est vrai, et c’est sans doute dû à la plus grande place accordée à la guitare électrique. Je joue toutes les parties sur cet album et ça faisait aussi partie de mon challenge personnel. On me parle tout le temps de Jimi Hendrix depuis que j’ai repris « May This Be Love » lors de ma première tournée, mais je me sens plus proche, dans l’esprit, d’Eddie Hazel. Tout ce qu’il a joué sur les albums de Funkadelic le place au niveau des plus grands.
Vous n’avez que 25 ans. Comment envisagez-vous la suite de votre carrière ?
La gestation de Love & Hate a été beaucoup plus longue que prévue. Quatre ans, c’est long… J’ai été victime d’une panne d’inspiration en cours de route et j’avoue avoir été complètement perdu à un moment donné. Par chance, cet album a complètement modifié ma manière de travailler. Grâce à Brian et Inflo, j’ai vraiment appris à collaborer, ce qui n’était pas le cas auparavant. Je sais que j’ai encore du temps devant moi et je sais aussi que je suis là pour durer.
Propos recueillis par Sly Stoned.
Michael Kiwanuka Love & Hate (Polydor/Universal). Disponible le 15 juillet. En concert à Paris (La Cigale) le 2 novembre.